« Les hommes peuvent et doivent faire partie de la solution »

Pour Gary Barker, cofondateur et directeur général de Promundo, les jeunes hommes doivent être engagés dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Un an après #Metoo, il fait le point sur la prévention des violences à l’égard des femmes.

Gary Barker
Co-fondateur et CEO de Promundo

Comment les groupes de Luxe peuvent-ils contribuer à la lutte contre les violences faites aux femmes ?

Chez Promundo, nous pensons que tout le monde, qu’il s’agisse des médias, des marques, des marketeurs ou des parents, doit participer à l’effort de transformation des normes sociales. Et il nous semble que les marques peuvent améliorer leur communication envers les hommes et les garçons. Les adultes doivent engager un dialogue avec les jeunes garçons sur les relations saines entre hommes et femmes. J’invite les marques à trouver les moyens d’encourager les parents, et les adultes en général, à parler avec les jeunes gens et à leur montrer des modèles positifs de masculinité. Ce type d’initiative est nécessaire pour s’assurer que la prévention et l’éradication de la violence à l’égard des femmes sont possibles et montrer que les hommes peuvent être non-violents, respectueux et bienveillants.

Comment la prévention de la violence contre les femmes a-t-elle évolué ?

Elle a longtemps été axée sur un message unique : la violence contre les femmes est un abus à combattre. Puis, au fur et à mesure nous avons constaté un changement de perspective : les hommes et les jeunes gens ne sont plus simplement vus comme d’éventuels agresseurs. Ils peuvent et doivent faire partie de la solution. Et nous avons commencé à voir de plus en plus d’actions de prévention qui s’attaquaient à la redéfinition de la masculinité. Avec une prise de conscience que certaines normes de masculinité sont l’un des moteurs de la violence chez les hommes.

Pourquoi vous concentrer sur la transformation des mentalités chez les hommes ?

Plusieurs de nos études, notamment « The Man Box, A study on being a young man in the US, UK, and Mexico », ont démontré que les hommes éduqués avec des idées traditionnelles sur la masculinité étaient plus susceptibles de commettre des actes de harcèlement ou de violence. Partant de là, nos programmes de prévention, en particulier Manhood 2.0, sont destinés aux jeunes hommes et aux garçons pour les aider à remettre en question ces normes, tout en valorisant une masculinité basée sur le respect, le dialogue, l’égalité et la non-violence. Et ça fonctionne ! Les jeunes impliqués dans nos programmes ont changé leurs comportements pour aider les victimes ou tempérer leur propre violence. Ils n’hésitent même plus à prendre la parole contre d’autres hommes enclins à la violence.

Un an après #MeToo, les hommes sont-ils plus attachés à l’égalité entre les sexes ?

Certains hommes sont inquiets, et je pense que c’est une bonne chose. Ils se demandent s’ils ont dit ou fait quelque chose qui pourrait relever du harcèlement ou de l’absence de consentement. Certains ont peur de commettre un acte qui pourrait leur être reprochés, d’autres d’être accusés à tort. Ces questionnements nous donnent l’opportunité d’engager les hommes et les jeunes gens dans un dialogue positif sur leur comportement et comment le modifier. Mais nous observons aussi un vrai retour en arrière. Certains hommes profitent de #MeToo pour contre-attaquer, pour affirmer que les femmes exagèrent leurs dénonciations. Nous devons poursuivre notre travail pédagogique pour faire avancer les choses. Rien n’est jamais acquis.

À quelle échelle est-il préférable de travailler pour l’égalité entre les sexes : mondiale ou locale ?

Il faut une prise de conscience mondiale et un engagement à l’échelle internationale pour financer des programmes et des politiques efficaces, mais il faut aussi des relais locaux pour appliquer ces mesures. Ainsi, le soutien international apporté par les Nations Unies à des programmes comme Manhood 2.0 a été essentiel pour encourager les municipalités, les écoles ou d’autres acteurs à mettre à disposition leurs ressources ou leurs locaux pour concrétiser ces programmes.